Le vitiligo est une perte des mélanocytes de la peau qui entraîne une dépigmentation de zones cutanées de différentes tailles. La cause reste inconnue, mais des facteurs génétiques et auto-immuns sont probables. Le diagnostic est souvent fait à l'examen de la peau. Les traitements habituels comprennent les corticostéroïdes topiques (souvent associés au calcipotriène), les inhibiteurs de la calcineurine (tacrolimus et pimécrolimus), et les ultraviolets B à bande étroite (UV). En cas de maladie généralisée, les UVB à bande étroite sont souvent le traitement de choix. En cas de grave dépigmentation étendue, les parcelles résiduelles de peau normale peuvent être dépigmentées de façon permanente (blanchies) avec de l'éther monobenzylique de l'hydroquinone. Une greffe de peau et un tatouage chirurgical peuvent également être envisagés.
(Voir aussi Revue générale des troubles de la pigmentation.)
Le vitiligo affecte jusqu'à 2% de la population (1).
Référence
1. Krüger C, Schallreuter KU. A review of the worldwide prevalence of vitiligo in children/adolescents and adults. Int J Dermatol. 2012;51(10):1206-1212. doi:10.1111/j.1365-4632.2011.05377.x
Étiologie du vitiligo
L'étiologie du vitiligo est inconnue, mais les mélanocytes sont absents dans les régions atteintes. Les mécanismes proposés comprennent la destruction auto-immune des mélanocytes, une survie réduite des mélanocytes, et des anomalies primitives des mélanocytes.
Le vitiligo peut être familial (de transmission autosomique dominante avec pénétrance incomplète et d'expression variable) ou acquis. Certains patients possèdent des anticorps contre la mélanine. Jusqu'à 30% des patients ont d'autres anticorps auto-immuns (contre la thyroglobuline, les cellules surrénaliennes et les cellules pariétales) ou des endocrinopathies auto-immunes (p. ex., maladie d'Addison, diabète sucré, anémie pernicieuse, dysfonctionnement thyroïdien) (1, 2). Cependant, la relation est mal connue et il pourrait s'agir d'une coïncidence. L'association la plus forte est avec la maladie de Graves-Basedow et la thyroïdite d'Hashimoto.
Le vitiligo est parfois observé après une atteinte physique de la peau (p. ex., en réponse à un coup de soleil). Le vitiligo peut également résulter de l'exposition à certains produits chimiques présents dans les produits ménagers et les colorants (3). Les patients peuvent associer l'apparition du vitiligo à un stress émotionnel.
L'immunothérapie contre le mélanome (p. ex., inhibiteurs de BRAF, inhibiteurs du programmed death receptor 1 [PD-1]) peut déclencher un vitiligo en tant qu'effet immunologique néfaste (4).
Références pour l'étiologie
1. Sheth VM, Guo Y, Qureshi AA. Comorbidities associated with vitiligo: a ten-year retrospective study. Dermatology. 2013;227(4):311-315. doi:10.1159/000354607
2. Rios-Duarte JA, Sanchez-Zapata MJ, Silverberg JI. Association of vitiligo with multiple cutaneous and extra-cutaneous autoimmune diseases: a nationwide cross-sectional study. Arch Dermatol Res. 2023;315(9):2597-2603. doi:10.1007/s00403-023-02661-y
3. Harris JE. Chemical-Induced Vitiligo. Dermatol Clin. 2017;35(2):151-161. doi:10.1016/j.det.2016.11.006
4. Burzi L, Alessandrini AM, Quaglino P, Piraccini BM, Dika E, Ribero S. Cutaneous Events Associated with Immunotherapy of Melanoma: A Review. J Clin Med. 2021;10(14):3047. Publié le 8 juillet 2021. doi:10.3390/jcm10143047
Symptomatologie du vitiligo
Le vitiligo est caractérisé par la présence de zones hypopigmentées ou dépigmentées, généralement très nettement délimitées et souvent symétriques. La dépigmentation peut impliquer 1 ou 2 taches, de grands segments (vitiligo segmentaire) ou, rarement, la majeure partie de la surface cutanée (vitiligo segmentaire); rarement, elle peut être généralisée, impliquant la plupart de la surface de la peau (vitiligo universel). Cependant, le vitiligo se localise le plus souvent sur le visage (en particulier autour des orifices), les doigts, le dos des mains, les poignets, les coudes, les genoux, les tibias, la partie dorsale des chevilles, les aisselles, la région inguinale, la région anogénitale, l'ombilic et les mamelons. Le préjudice esthétique peut être particulièrement important et émotionnellement dévastateur chez le patient à la peau foncée. Les poils sont habituellement blanc craie dans les zones de vitiligo.
Cette photo montre un vitiligo focal du pied.
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Photo courtoisie de Karen McKoy, MD.
La défiguration esthétique montrée sur cette photo est importante.
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Les poils sont habituellement blanc craie dans les zones de vitiligo.
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Diagnostic du vitiligo
Bilan clinique
La peau dépigmentée est généralement évidente à l'examen en particulier chez les sujets à peau foncée.
Lésions hypopigmentées ou dépigmentées subtiles sont accentuées par la lumière de Wood (365 nm) qui montre l'aspect blanc craie de la peau dépigmentée.
Le diagnostic différentiel comprend l'hypopigmentation postinflammatoire, le piébaldisme (une maladie autosomique dominante rare dans laquelle des plaques dépigmentées entourées de zones hyperpigmentées apparaissent le plus souvent sur le front, le cou, la partie antérieure du tronc et au milieu des membres), les morphées (sclérodermie localisée, dans laquelle la peau est généralement sclérosée), la lèpre (dans laquelle les lésions sont généralement hypoesthésiques), le lichen scléreux, le pityriasis alba, la leukodermie chimique et la leukodermie due au mélanome.
Bien qu'il n'y ait pas de lignes directrices fondées sur des preuves, il est raisonnable d'effectuer une numération formule sanguine, une glycémie à jeun, des tests de la fonction thyroïdienne et des anticorps anti-péroxydase antithyroïdienne (fréquemment présents dans la thyroïdite d'Hashimoto) comme indiqué cliniquement par la revue des systèmes.
Traitement du vitiligo
Protection des zones touchées par la lumière du soleil
Corticostéroïdes et calcipotriène locaux
Inhibiteurs topiques de la calcineurine lorsque le visage ou l'aine sont impliqués
UVB à bande étroite (UVB)
Le vitiligo peut être difficile à prendre en charge; la repigmentation initiale et le maintien du pigment peuvent être imprévisibles. Les médecins doivent être conscients des sensibilités individuelles et ethniques concernant une couleur de peau uniforme; la maladie peut être psychologiquement dévastatrice. Toutes les régions dépigmentées sont prédisposées à de graves coups de soleil et doivent être protégées au moyen de vêtements ou d'un écran solaire.
Les petites lésions dispersées peuvent être dissimulées par du maquillage. En cas d'atteinte plus importante, le traitement vise généralement à repigmenter. Bien que l'on en sache peu sur l'efficacité comparative de nombre de ces traitements, des revues (1) et des recommandations consensuelles (2) ont été récemment publiées. Le traitement de première intention traditionnel repose sur de puissants corticostéroïdes locaux, qui peuvent aussi entraîner une hypopigmentation ou une atrophie de la peau normale entourant la zone atteinte, un effet indésirable de l'utilisation chronique de corticostéroïdes. Les inhibiteurs de la calcineurine (tacrolimus et pimécrolimus) peuvent être des alternatives particulièrement utiles pour traiter les zones de la peau telles que le visage et l'aine où les effets indésirables de la corticothérapie locale se produisent le plus souvent. Le calcipotriène mélangé avec le dipropionate de bétaméthasone peut également être utile et plus efficace que la monothérapie par l'un ou l'autre médicament.
Les UVB à bande étroite (NB-UVB) sont souvent le traitement initial préféré du vitiligo généralisé, en particulier chez les patients chez lesquels l'immunosuppression est contre-indiquée (3). Le laser à excimer (308 nm) peut être utile, en particulier en cas de maladie localisée qui ne répond pas au traitement topique initial. Lorsque l'on envisage une photothérapie, l'augmentation théorique du risque de cancers de la peau doit être discutée avec les patients. Les patients sous photothérapie peuvent tirer profit de dépistages réguliers du cancer de la peau.
En cas de vitiligo à progression rapide (sur des semaines ou des mois), une corticothérapie orale à faible dose pendant quelques semaines peut être envisagée pour limiter la propagation. Les corticostéroïdes oraux ne repigmentant pas la peau, les UVB à bande étroite (NB-UVB) peuvent être ajoutés pour faciliter la repigmentation.
La chirurgie est envisageable seulement chez les patients stables, dont la maladie est limitée en cas d'échec du traitement médical. Les thérapies comprennent la microgreffe autologue (4), ou la greffe par bulle de succion, ainsi que le tatouage; le tatouage est particulièrement utile pour les zones difficiles à repigmenter telles que les mamelons, les lèvres et les pulpes.
Une dépigmentation cutanée normale pour obtenir une couleur de peau homogène est possible avec du monobenzyl éther d'hydroquinone à 20% appliqué 2 fois/jour. Ce traitement n'est indiqué que lorsque la majeure partie de la peau est touchée et que le patient est préparé à une perte de pigments permanente et aux risques accrus de lésions ultérieures photo-induites de la peau (p. ex., cancers de la peau, photovieillissement). Ce traitement peut être extrêmement irritant, donc une petite zone doit être traitée avant une large utilisation. Un traitement pendant ≥ 1 an peut être nécessaire.
L'inhibiteur topique de la Janus kinase (JAK), ruxolitinib (JAK 1 et 2), est disponible pour le traitement du vitiligo (5). Un autre inhibiteur de JAK, le tofacitinib (JAK 1 et 3) est actuellement à l'étude. Cependant, la dépigmentation peut réapparaître après l'arrêt de ces agents.
Références pour le traitement
1. Kubelis-López DE, Zapata-Salazar NA, Said-Fernández SL, et al. Updates and new medical treatments for vitiligo (Review). Exp Ther Med. 2021;22(2):797. doi:10.3892/etm.2021.10229
2. van Geel N, Speeckaert R, Taïeb A, et al. Worldwide expert recommendations for the diagnosis and management of vitiligo: Position statement from the International Vitiligo Task Force Part 1: towards a new management algorithm. J Eur Acad Dermatol Venereol. 2023;37(11):2173-2184. doi:10.1111/jdv.19451
3. Esmat SM, El-Mofty M, Rasheed H, et al. Efficacy of narrow band UVB with or without OMP in stabilization of vitiligo activity in skin photo-types (III-V): A double-blind, randomized, placebo-controlled, prospective, multicenter study. Photodermatol Photoimmunol Photomed. 2022;38(3):277-287. doi:10.1111/phpp.12749
4. Gan EY, Kong YL, Tan WD, et al. Twelve-month and sixty-month outcomes of noncultured cellular grafting for vitiligo. J Am Acad Dermatol. 2016;75(3):564-571. doi:10.1016/j.jaad.2016.04.007
5. Phan K, Phan S, Shumack S, Gupta M. Repigmentation in vitiligo using janus kinase (JAK) inhibitors with phototherapy: systematic review and Meta-analysis. J Dermatolog Treat. 2022;33(1):173-177. doi:10.1080/09546634.2020.1735615.
Points clés
Certains cas de vitiligo peuvent impliquer des mutations génétiques ou des troubles auto-immuns.
Le vitiligo peut être focal, segmentaire, ou, plus rarement, généralisé.
Diagnostiquer par l'examen de la peau mais envisager de tester par numération formule sanguine, glycémie à jeun, des tests de la fonction thyroïdienne et les anticorps anti-péroxydase thyroïdienne.
Envisager des traitements par le calcipotriène topique plus dipropionate de bétaméthasone, la monothérapie corticostéroïde topique, les UVB à bande étroite, ou un inhibiteur de la calcineurine (tacrolimus et pimécrolimus).
Les inhibiteurs de Janus kinase sont une modalité de traitement émergente du vitiligo.