Uvéite causée par une maladie rhumatologique systémique

ParKara C. LaMattina, MD, Boston University School of Medicine
Vérifié/Révisé mai 2024
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    Un certain nombre de maladies rhumatologiques systémiques entraînent une inflammation du tractus uvéal. (Voir aussi Revue générale des uvéites.)

    Spondylarthropathies

    Les spondylarthropathies séronégatives sont une cause fréquente d'uvéite antérieure.

    Parmi les spondylarthropathies séronégatives, l'inflammation oculaire est plus fréquente dans la spondylarthrite ankylosante (1), mais elle peut également survenir avec l'arthrite réactionnelle, une maladie intestinale inflammatoire (rectocolite ulcéro-hémorragique et maladie de Crohn) ou l'arthrite psoriasique. L'uvéite est généralement unilatérale, mais les récidives sont fréquentes et peuvent alterner entre les deux yeux. Les hommes sont touchés plus souvent que les femmes. La plupart des patients, quel que soit le sexe, sont HLA-B27 positifs.

    Le traitement nécessite une corticothérapie topique et un collyre mydriatique-cycloplégique (2). Parfois, des injections périoculaires de corticostéroïdes sont nécessaires. Les cas chroniques sévères peuvent nécessiter l'utilisation de médicaments immunosuppresseurs non stéroïdiens (p. ex., méthotrexate, mycophénolate mofétil, inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale).

    Arthrite juvénile idiopathique

    L'arthrite juvénile idiopathique (précédemment appelée polyarthrite rhumatoïde) entraîne généralement une iridocyclite bilatérale chronique chez l'enfant, en particulier dans la forme oligo-articulaire. Cependant, contrairement à la plupart des uvéites antérieures, l'uvéite associée à l'arthrite juvénile idiopathique n'entraîne généralement pas de douleurs, de photophobie ou d'injection conjonctivale, mais seulement un flou visuel et un myosis et est donc souvent appelée iritis blanche. Elle peut être asymptomatique. Les symptômes pouvant être négligés ou absents, les patients qui présentent une arthrite juvénile idiopathique doivent être régulièrement dépistés.

    La polyarthrite rhumatoïde, en revanche, n'a pas été associée à une uvéite isolée, mais elle peut causer une sclérite, ce qui peut provoquer une inflammation du tractus uvéal secondaire.

    Les poussées récurrentes de l'inflammation sont au mieux traitées par un corticostéroïde topique, et un collyre mydriatique-cycloplégique (3). Compte tenu de la nature chronique de la maladie et du risque de développement d'une cataracte et d'un glaucome liés au traitement, le contrôle à long terme nécessite souvent l'utilisation d'un immunosuppresseur non stéroïdien (p. ex., méthotrexate ou mycophénolate mofétil, inhibiteurs du facteur de nécrose tumorale).

    Sarcoïdose

    La sarcoïdose représente jusqu'à 25% des cas d'uvéite (4), et diverses études ont montré qu'entre 10 et 50% des patients de race blanche atteints de sarcoïdose développent une uvéite (5). L'uvéite sarcoïdosique est plus fréquente chez les patients d'origine africaine (5) et les patients âgés.

    En pratique, toute la symptomatologie de l'uvéite antérieure, intermédiaire, postérieure ou diffuse peut être observée. Les signes évocateurs comprennent les granulomes conjonctivaux, de grands précipités kératiniens sur l'endothélium cornéen (également appelés précipitats granulomateux ou "en graisse de mouton"), des granulomes iriens, rétiniens ou choroïdiens et des vascularites rétiniennes. Le diagnostic de certitude repose sur la biopsie de lésions évocatrices, qui est habituellement réalisée sur la conjonctive; il est rarement fait sur les tissus intraoculaires, du fait des risques associés à cette procédure.

    Le traitement implique habituellement des corticostéroïdes topiques, péri-oculaires (injectés), intraoculaires ou systémiques, ou une association de ces stéroïdes, accompagnés d'un médicament mydriatique-cycloplégique topique (5). Le patient qui souffre d'une inflammation ou d'une maladie modérée à grave ou ceux qui ont une atteinte systémique peuvent nécessiter un traitement immunosuppresseur non corticostéroïdien (p. ex., méthotrexate, mycophénolate mofétil, inhibiteurs du TNF [tumor necrosis factor]).

    Maladie de Behçet

    La maladie de Behçet est rare en Amérique du Nord mais c'est une cause plus fréquente d'uvéite dans les pays qui s'étendent du bassin méditerranéen à l'Est de l'Asie, connue sous le nom de l'ancienne route de la soie.

    Les signes caractéristiques sont une uvéite antérieure sévère avec hypopion, rétinite, une vascularite rétinienne et une inflammation de la papille optique. L'évolution clinique est habituellement sévère avec de multiples récidives.

    Le diagnostic requiert la présence de manifestations systémiques associées, tels que des aphtes oraux ou des ulcères génitaux; d'une dermatite, y compris érythème noueux; thrombophlébite; ou épididymite. Les aphtes peuvent être biopsiés, et mettre en évidence une vascularite occlusive. Il n'existe aucun test diagnostique de la maladie de Behçet, mais elle est associée au HLA-B51.

    Le traitement par des corticostéroïdes locaux et systémiques, et un collyre mydriatique-cycloplégique peut soulager les poussées aiguës, mais la plupart des patients ont à terme besoin de corticostéroïdes systémiques et d'un immunosuppresseur non stéroïdien, afin de contrôler l'inflammation et d'éviter les graves complications à long terme du traitement par des corticostéroïdes (6). Des agents biologiques tels que les interférons et les anti-TNF, ont été efficaces chez des patients sélectionnés et résistants à d'autres thérapies. Les agents alkylants (p. ex., cyclosporine et chlorambucil) ont pu induire une rémission.

    Maladie de Vogt-Koyanagi-Harada

    La maladie de Vogt-Koyanagi-Harada est une affection systémique rare, qui se caractérise par une uvéite accompagnée de signes dermatologiques et neurologiques. La maladie de Vogt-Koyanagi-Harada est particulièrement fréquente chez les Asiatiques, les Indiens, les descendants des Indiens d'Amérique et les Hispaniques. L'étiologie est inconnue, bien qu'une réaction auto-immune dirigée contre des cellules contenant de la mélanine dans le tractus uvéal, dans la peau, dans l'oreille interne et dans les méninges, soit fortement suspectée.

    Les symptômes neurologiques tendent à se manifester précocement et comprennent des acouphènes, une dysacousie (agnosie auditive), des vertiges, des céphalées et des signes méningés. Fréquemment, les manifestations cutanées surviennent plus tard et comprennent un vitiligo tacheté (particulièrement fréquent sur les paupières, le bas du dos et les fesses), une poliose (une plaque localisée de cheveux blancs qui peut toucher les cils) et une alopécie, souvent localisée au niveau de la tête et du cou. Les complications oculaires les plus fréquentes comprennent l'œdème papillaire et la choroïdite. Les complications oculaires tardives sont représentées par la cataracte, le glaucome, la fibrose sous-rétinienne et le développement d'une néovascularisation choroïdienne.

    Le traitement précoce comprend des corticostéroïdes topiques et systémiques avec des collyres mydriatiques-cycloplégiques. De nombreux patients nécessitent également des médicaments immunosuppresseurs non corticostéroïdiens (p. ex., méthotrexate, mycophénolate mofétil) (7).

    Syndrome de néphrite tubulo-interstitielle et uvéite

    Le syndrome de néphrite tubulo-interstitielle et uvéite se manifeste généralement par une uvéite antérieure bilatérale aiguë non granulomateuse, bien qu'elle soit souvent accompagnée de complications postérieures, dont un œdème du nerf optique et de la macula. Il affecte le plus souvent les adolescentes, mais peut survenir à tout âge. Les symptômes comprennent une douleur et une rougeur oculaires, une diminution de l'acuité visuelle et une photophobie. Les patients peuvent avoir des antécédents de symptômes prodromiques viraux ainsi que des douleurs de l'hypochondre, une polyurie et une nycturie. Le bilan de la néphrite peut comprendre les taux de bêta-2-microglobuline urinaire et parfois une biopsie rénale. Alors que la lésion rénale aiguë est souvent autolimitée dans le syndrome de néphrite tubulo-interstitielle et uvéite, la maladie oculaire est souvent chronique (8).

    Le traitement par des stéroïdes oraux à la phase aiguë et l'utilisation de médicaments immunosuppresseurs non corticostéroïdes (p. ex., mycophénolate mofétil) pour la maladie chronique est souvent nécessaire.

    Références

    1. 1. Rosenbaum JT, Dick AD: The eyes have it: A rheumatologist's view of uveitis. Arthritis Rheumatol 70(10):1533-1543, 2018. doi: 10.1002/art.40568

    2. 2. Rademacher J, Poddubnyy D, Pleyer U: Uveitis in spondyloarthritis. Ther Adv Musculoskelet Dis 12:1759720X20951733, 2020. doi: 10.1177/1759720X20951733

    3. 3. Oray M, Tugal-Tutkun I: Treatment of juvenile idiopathy arthritis-associated uveitis. Turkish J Ophthalmol 46;2:77-82, 2016. doi: 10.4274/tjo.09581  

    4. 4. Merrill PT, Kim J, Cox TA, et al: Uveitis in the southeastern United States. Curr Eye Res 16(9):865-874, 1997. doi: 10.1076/ceyr.16.9.865.5048

    5. 5. Giorgiutti S, Jacquot R, El Jammal T, et al: Sarcoidosis-related uveitis: A review. J Clin Med 12(9):3194, 2023. doi: 10.3390/jcm12093194

    6. 6. Joubert M, Desbois AC, Domont F, et al: Behçet's disease uveitis. J Clin Med 12(11):3648, 2023. doi: 10.3390/jcm12113648.

    7. 7. Joye A, Suhler E: Vogt-Koyanagi-Harada disease. Curr Opin Ophthalmol 32(6):574-582, 2021. doi: 10.1097/ICU.0000000000000809.

    8. 8. Koreishi AF, Zhou M, Goldstein DA: Tubulointerstitial nephritis and uveitis syndrome: Characterization of clinical features. Ocul Immunol Inflamm 17;29(7-8):1312-1317, 2021. doi: 10.1080/09273948.2020.1736311

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