Myasthénie grave

ParMichael Rubin, MDCM, New York Presbyterian Hospital-Cornell Medical Center
Vérifié/Révisé mars 2024
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Les faits en bref

La myasthénie grave est une maladie auto-immune qui perturbe la communication entre les nerfs et les muscles, et qui a pour conséquence une faiblesse musculaire.

  • La myasthénie grave provient d’un dysfonctionnement du système immunitaire.

  • Les personnes ont généralement des paupières tombantes et une vision double, et les muscles deviennent anormalement fatigués et faibles après avoir été sollicités et récupèrent lorsqu’ils sont reposés.

  • Examens utilisant une poche de glace ou le repos pour observer si les paupières tombent moins avec ces mesures ; l’électromyographie et les analyses de sang peuvent aider à confirmer le diagnostic.

  • Certains médicaments peuvent améliorer la force musculaire rapidement, d’autres peuvent ralentir la progression de la maladie.

  • Si une crise myasthénique survient, on utilise des immunoglobulines par voie IV ou on a recours à une plasmaphérèse.

(Voir également Présentation des troubles de la jonction neuromusculaire.)

La myasthénie grave se développe généralement chez des femmes âgées de 20 à 40 ans et chez des hommes âgés de 50 à 80 ans. Cependant, la maladie peut toucher les hommes ou les femmes de tous âges. Elle commence rarement à l’enfance.

Les nerfs communiquent avec les muscles en libérant un messager chimique (neurotransmetteur) qui interagit avec les récepteurs des muscles (à la jonction neuromusculaire) et stimule leur contraction. Chez la plupart des personnes présentant une myasthénie grave, le système immunitaire produit des anticorps qui attaquent un certain type de récepteurs présents sur le versant musculaire de la jonction neuromusculaire, les récepteurs qui répondent au neurotransmetteur acétylcholine. Par conséquent, la communication entre les cellules nerveuses et les muscles est perturbée.

La cause de cette attaque par l’organisme de ses propres récepteurs de l’acétylcholine, une réaction auto-immune, est inconnue. Selon une hypothèse, un dysfonctionnement du thymus pourrait être en cause. Dans le thymus, certaines cellules du système immunitaire apprennent à distinguer les substances corporelles des substances étrangères. Le thymus, pour une raison inconnue, ordonne au système immunitaire de produire des anticorps qui attaquent les récepteurs à l’acétylcholine. Il est possible que les patients présentent une prédisposition au développement de ces anomalies auto-immunes. Environ 65 % des patients qui ont une myasthénie grave ont un thymus hypertrophié, et environ 10 % des patients ont une tumeur du thymus (thymome). Environ la moitié de ces thymomes sont cancéreux (malins).

Par ailleurs, la myasthénie grave survient souvent chez des personnes ayant d’autres maladies auto-immunes, comme une polyarthrite rhumatoïde, un lupus érythémateux systémique et des maladies provoquant une hyperactivité de la thyroïde (hyperthyroïdie auto-immune), comme c’est le cas dans la thyroïdite d’Hashimoto.

Certaines personnes atteintes de myasthénie grave n’ont pas d’anticorps aux récepteurs de l’acétylcholine, mais des anticorps dirigés contre une enzyme impliquée dans la formation de la jonction neuromusculaire. Ces personnes peuvent nécessiter un traitement différent.

La myasthénie grave peut être déclenchée par :

  • Infections

  • Chirurgie

  • Prise de certains médicaments, comme la nifédipine ou le vérapamil (utilisés pour traiter l’hypertension artérielle), la quinine (utilisée pour traiter le paludisme) et le procaïnamide (utilisé pour traiter les anomalies du rythme cardiaque)

Dans de rares cas, la myasthénie grave est transmise selon un mode récessif autosomique (non lié au sexe). C’est-à-dire que deux gènes de la maladie, un de chaque parent, sont nécessaires pour que la maladie se développe chez l’enfant.

Myasthénie néonatale

La myasthénie néonatale se présente chez 12 % des enfants dont la mère est atteinte de myasthénie grave. Les anticorps contre les récepteurs de l’acétylcholine, qui circulent dans le sang, peuvent passer de la femme enceinte au fœtus par le placenta. Dans ces cas, l’enfant présente une faiblesse musculaire qui disparaît en quelques jours ou semaines après la naissance. 88 % des enfants ne seront pas atteints.

Symptômes de la myasthénie grave

Les périodes où les symptômes s’aggravent (exacerbations) sont fréquentes. Entre ces épisodes d’exacerbation, les symptômes peuvent être minimes, voire absents.

Symptômes les plus fréquents de la myasthénie grave :

  • Paupières faibles et tombantes

  • Muscles oculaires faibles, qui provoquent une vision double

  • Faiblesse excessive des muscles touchés après leur sollicitation

Chez un patient myasthénique, l’utilisation répétitive d’un muscle entraîne son affaiblissement. Par exemple, un patient qui utilisait auparavant un marteau sans problème constatera un affaiblissement de ses mouvements au bout de quelques minutes. La faiblesse disparaît quand les muscles sont reposés, mais revient quand ils sont de nouveau utilisés.

La faiblesse musculaire varie en intensité d’une minute à l’autre, d’une heure à l’autre ou d’un jour à l’autre, et l’évolution de la maladie est donc très fluctuante. La faiblesse est moins prononcée lors de températures plus fraîches.

Chez environ 40 % des patients atteints de myasthénie grave, les muscles oculaires sont les premiers à être touchés, mais au total ces muscles sont concernés dans 85 % des cas au cours de la maladie. Dans 15 % des cas, seuls les muscles oculaires sont concernés, mais chez la majorité des patients, la totalité de la musculature de l’organisme peut être atteinte.

Des difficultés d’articulation et de déglutition, une faiblesse des bras ou des jambes sont d’autres symptômes fréquents. Les muscles cervicaux peuvent s’affaiblir. La sensation n’est pas altérée.

Crise myasthénique

Environ 15 à 20 % des patients atteints de myasthénie grave présentent un épisode d’aggravation importante des symptômes (appelé crise myasthénique) au moins une fois dans leur vie. Cette crise est parfois déclenchée par une infection. Les bras et les jambes peuvent devenir très faibles, mais, même dans ce cas, ils ne présentent pas de trouble de la sensation.

Chez certains patients, les muscles respiratoires s’affaiblissent (causant une insuffisance respiratoire). Ce trouble menace le pronostic vital.

Diagnostic de la myasthénie grave

  • Tests utilisant une poche de glace ou le repos

  • Électromyographie

  • Analyses de sang

Le diagnostic est évoqué devant des épisodes de faiblesse musculaire, notamment au niveau des muscles oculaires ou du visage, en particulier lorsque la faiblesse musculaire est aggravée par l’effort physique et améliorée par le repos.

Comme la fraîcheur et le repos diminuent la faiblesse due à la myasthénie, les médecins peuvent avoir recours au test à la poche de glace ou au test de repos pour rechercher la myasthénie grave.

Ce test à la poche de glace est réalisé uniquement si les paupières de la personne tombent de façon évidente. Les médecins appliquent une poche de glace sur les yeux de la personne pendant 2 minutes, puis la retirent. Si l’affaissement disparaît, les médecins soupçonnent une myasthénie grave.

Le test du repos est réalisé si une personne a des difficultés à bouger le globe oculaire (ce qui provoque généralement une vision double). La personne doit faire travailler les muscles de ses yeux jusqu’à ce qu’ils se fatiguent. Ensuite, les médecins demandent à la personne de s’allonger tranquillement dans une pièce sombre pendant quelques minutes avec les yeux fermés. Si les yeux bougent alors normalement et que la vision double disparaît, les médecins suspectent une myasthénie grave.

D’autres examens complémentaires sont nécessaires pour confirmer le diagnostic. À savoir :

  • Électromyographie (insertion d’une aiguille dans un muscle pour enregistrer son activité électrique)

  • Analyses de sang pour détecter des anticorps contre les récepteurs de l’acétylcholine et, parfois, les autres anticorps présents chez les personnes souffrant de la maladie

On procède également à des analyses de sang pour rechercher d’autres troubles, y compris des troubles de la thyroïde.

Une fois la myasthénie grave diagnostiquée, la tomodensitométrie (TDM) ou l’imagerie par résonance magnétique (IRM) du thorax permet de visualiser le thymus et de déceler un éventuel thymome.

D’autres examens sont réalisés pour rechercher des maladies auto-immunes fréquentes chez les personnes atteintes de myasthénie grave, telles qu’une anémie pernicieuse, une polyarthrite rhumatoïde et un lupus érythémateux systémique (lupus).

Des épreuves fonctionnelles respiratoires sont réalisées lorsque la faiblesse est suffisamment sévère pour affecter la respiration. Ces examens permettent de déterminer si une assistance respiratoire est nécessaire (ventilation mécanique).

Traitement de la myasthénie grave

  • Pyridostigmine ou médicament similaire

  • Corticoïde ou médicament inhibant le système immunitaire

  • Parfois, immunoglobulines par voie intraveineuse ou plasmaphérèse

  • Souvent, ablation du thymus

Chez les personnes atteintes de myasthénie grave, des médicaments peuvent être utilisés pour :

  • Contribuer à un renforcement musculaire rapide

  • Supprimer la réaction auto-immune et ralentir la progression de la maladie

Médicaments pour contribuer à un renforcement musculaire rapide

Les médicaments qui augmentent la quantité d’acétylcholine, comme la pyridostigmine (par voie orale), peuvent améliorer la force musculaire. Des comprimés à action prolongée à prendre le soir sont disponibles, notamment en cas de faiblesse musculaire ou de troubles de la déglutition importants au réveil.

Les médecins doivent régulièrement ajuster la posologie des médicaments, qui doit être augmentée en cas d’affection intercurrente. Cependant, des posologies trop élevées peuvent entraîner une faiblesse musculaire, difficile à distinguer de celle provoquée par la maladie. Cet effet est appelé crise cholinergique. Si une crise cholinergique se produit, le médicament doit être arrêté pendant plusieurs jours. Lors d’une crise cholinergique (comme dans une crise myasthénique), les muscles nécessaires pour la respiration peuvent être affaiblis. Dans ces cas, les personnes sont traitées dans une unité de soins intensifs.

De plus, l’efficacité de ces produits a tendance à diminuer en cas d’utilisation de longue durée. Ainsi, toute majoration de la faiblesse musculaire qui peut être due à une baisse de l’efficacité des médicaments doit être soigneusement évaluée par un médecin expérimenté dans le traitement de la myasthénie grave.

Les effets secondaires les plus fréquents de la pyridostigmine comprennent des crampes abdominales et la diarrhée. Afin de contrer ces effets, on peut utiliser des ralentisseurs du transit, comme l’atropine ou la propanthéline. Si une insuffisance respiratoire se développe, une ventilation mécanique peut être nécessaire.

Traitements pour supprimer la réaction auto-immune

Pour supprimer la réaction auto-immune, les médecins peuvent aussi prescrire les traitements suivants :

  • Un corticoïde, comme la prednisone

  • Un médicament qui inhibe le système immunitaire (immunosuppresseur), comme le mycophénolate mofétil, la ciclosporine ou l’azathioprine

Ces médicaments sont pris par voie orale.

La plupart des personnes doivent prendre un corticoïde indéfiniment. Si la dose initiale de corticoïdes est trop élevée, les symptômes peuvent d’abord s’aggraver, mais une amélioration est néanmoins observée au bout de quelques semaines. La dose est ensuite réduite au minimum efficace. L’utilisation prolongée de corticoïdes peut avoir des effets secondaires modérés ou graves. Ainsi, de l’azathioprine peut être administrée pour pouvoir arrêter les corticoïdes ou en réduire la dose. Avec l’azathioprine, l’amélioration peut être observée au bout de nombreux mois.

Lorsque ces médicaments ne soulagent pas, il peut être utile d’utiliser des anticorps monoclonaux, tels que le rituximab ou l’éculizumab. Les anticorps monoclonaux sont des anticorps de synthèse qui ciblent et suppriment des segments spécifiques du système immunitaire.

L’efgartigimod, un autre type d’anticorps monoclonal, peut être utilisé pour traiter la myasthénie grave.

Il est possible d’utiliser une immunoglobuline par voie intraveineuse (IGIV) ou une plasmaphérèse lorsqu’une crise myasthénique se produit. Elles peuvent aussi être utilisées lorsque les médicaments n’apportent pas de soulagement et que le thymus va être retiré (avant cette opération).

L’immunoglobuline (une solution contenant de nombreux différents anticorps recueillis d’un groupe de donneurs) peut être administrée par voie intraveineuse (dans une veine) une fois par jour pendant 5 jours. Elle contient des anticorps qui aident à contrôler le système immunitaire et interrompent la réaction auto-immune à l’origine de la myasthénie grave. Plus des deux tiers des personnes voient une amélioration au bout d’une ou deux semaines, et les effets peuvent durer jusqu’à 2 mois.

La plasmaphérèse consiste à filtrer des substances toxiques (dans ce cas, des anticorps anormaux) du sang. L’amélioration après la plasmaphérèse est similaire à celle observée après la prise d’immunoglobulines.

Autres traitements

Si un thymome est présent, le thymus est enlevé chirurgicalement pour prévenir la propagation du thymome. L’ablation peut entraîner une rémission ou permettre aux médecins de réduire la dose de corticoïde.

Parfois, les médecins retirent le thymus même s’il n’y a pas de thymome. Ce traitement semble atténuer les symptômes de la myasthénie grave sur le long terme.

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