Les extrasystoles ventriculaires sont des impulsions ectopiques isolées provoquées par une réentrée locale située au niveau ventriculaire ou secondaire à un phénomène automatique provenant des cellules ventriculaires ou des cellules de Purkinje. Elles sont très fréquentes tant chez le patient par ailleurs en bonne santé que chez le patient cardiopathe. Les extrasystoles ventriculaires peuvent être asymptomatiques ou entraîner des palpitations. Le diagnostic repose sur l'ECG. Le traitement n'est habituellement pas nécessaire.
(Voir aussi Revue générale des troubles du rythme.)
Les extrasystoles ventriculaires, peuvent généralement survenir de manière aléatoire ou à intervalles prévisibles (p. ex., tous les 3 battements [trigéminisme] ou tous les 2 battements [bigéminisme]). Les extrasystoles ventriculaires peuvent se majorer sous l'impulsion de certains facteurs (p. ex., anxiété, stress, alcool, caféine et certains médicaments et substances sympathomimétiques), durant l'hypoxie ou en présence de troubles hydro-électrolytiques. Bien que les extrasystoles ventriculaires soient généralement bénignes, elles peuvent être la manifestation d'un trouble cardiaque structurel. Une augmentation de la fréquence ou de la complexité du battement ventriculaire prématuré à l'effort peut indiquer une ischémie myocardique réversible. Les patients qui ont des extrasystoles ventriculaires très fréquentes peuvent développer une cardiomyopathie réversible induite par les extrasystoles ventriculaires, en particulier en cas de cardiomyopathie sous-jacente (1).
Certaines personnes dont le cœur est structurellement normal ont des extrasystoles ventriculaires dues à des post-dépolarisations retardées à médiation par l'AMPc. Du fait de leurs sites d'origine habituels, ces extrasystoles ventriculaires sont appelées extrasystoles ventriculaires de la voie d'éjection du ventricule droit (infundibulum ou chambre de chasse) ou extrasystoles ventriculaires de la voie d'éjection du ventricule gauche (2). Elles ont généralement une morphologie similaire à celle du bloc de branche gauche et un axe vertical dirigé vers le bas (QRS positif en dérivation V1, QRS négatif en dérivation AVL et QRS quasi-isoélectrique en dérivation I) (voir figure Rythme sinusal avec extrasystoles ventriculaires dû à une ectopie de la voie d'éjection du ventricule droit [infundibulum]).
Les extrasystoles ventriculaires peuvent être ressenties comme des battements manqués ou ignorés; l'extrasystole ventriculaire en elle-même n'est pas ressentie; en revanche le patient ressent l'augmentation du rythme sinusal qui suit. Lorsque les extrasystoles ventriculaires sont très fréquentes, notamment si elles se produisent tous les 2 battements, des symptômes hémodynamiques légers peuvent apparaître car la fréquence sinusale est réduite de moitié. Des souffles d'éjection préexistants peuvent être amplifiés du fait d'un meilleur remplissage ventriculaire et d'une augmentation de la contractilité cardiaque après la pause compensatoire qui suit une extrasystole ventriculaire.
Références générales
1. Latchamsetty R, Bogun F: Premature Ventricular Complex-Induced Cardiomyopathy. JACC Clin Electrophysiol 5(5):537–550, 2019. doi: 10.1016/j.jacep.2019.03.013
2. Lerman BB: Mechanism, diagnosis, and treatment of outflow tract tachycardia. Nat Rev Cardiol 12(10):597–608, 2015. doi: 10.1038/nrcardio.2015.121
Diagnostic des extrasystoles ventriculaires
ECG
Parfois, surveillance ambulatoire et échocardiographie sur 24 heures
Le diagnostic d'extrasystole ventriculaire repose sur l'ECG qui révèle un QRS large isolé sans onde P, habituellement suivi d'une pause compensatrice. Les patients dont les antécédents (y compris les antécédents familiaux), l'examen clinique ou l'ECG suggèrent un possible trouble cardiaque structurel sous-jacent doivent bénéficier d'une surveillance ambulatoire des 24 heures et d'une échocardiographie (1). Si une cardiopathie ischémique est suspectée, un test d'effort est effectué à des fins diagnostiques et pour déterminer la nécessité de tests supplémentaires pour évaluer la gravité de la maladie coronarienne et les possibilités de revascularisation coronariennes (1).
© Springer Science+Business Media
Image courtesy of L. Brent Mitchell, MD.
Référence pour le diagnostic
1. Pedersen CT, Kay GN, Kalman J, et al: EHRA/HRS/APHRS expert consensus on ventricular arrhythmias. Heart Rhythm 11(10):e166–e196, 2014. doi: 10.1016/j.hrthm.2014.07.024
Traitement des extrasystoles ventriculaires
Les bêta-bloqueurs ou les antagonistes calciques non dihydropyridiniques en cas de symptômes gênants
Rarement, un médicament antiarythmique de classe I ou III
Rarement, ablation
En l'absence de cardiopathie structurelle, les extrasystoles ventriculaires asymptomatiques ou modérément symptomatiques ont un pronostic bénin et ne nécessitent aucun traitement autre que la réassurance (1). Le traitement des extrasystoles ventriculaires n'est nécessaire que pour soulager les symptômes gênants.
Le traitement commence par des bêta-bloqueurs ou des antagonistes calciques non dihydropyridiniques (vérapamil ou diltiazem). Ces médicaments sont particulièrement efficaces chez les patients qui ont des extrasystoles ventriculaires qui ont pour origine la chambre de chasse (infundibulum) des ventricules droit ou gauche (1). Les médicaments antiarythmiques de classe I ou de classe III peuvent augmenter le risque de mort et ne sont pas couramment utilisés en cas de cardiopathie structurelle. Pour prévenir et/ou inverser la cardiomyopathie induite par des extrasystoles ventriculaires, les patients qui ont des extrasystoles ventriculaires-résistantes aux médicaments et une dysfonction systolique ventriculaire progressive sont traités par ablation transcathéter (2). L'ablation peut également être proposée si les symptômes sont intolérables (1). L'ablation est particulièrement efficace chez les patients présentant des extrasystoles ventriculaires qui ont pour origine la chambre de chasse (infundibulum) des ventricules droit ou gauche (1).
En cas de cardiopathie structurelle, de fréquentes extrasystoles ventriculaires (> 10/minute) sont corrélées à une augmentation de la mortalité. Néanmoins, aucune étude n'a montré que la suppression pharmacologique réduisait la mortalité.
Les patients en période post-infarctus du myocarde ont une mortalité plus élevée lorsqu'ils sont traités par des antiarythmiques de classe I qu'avec un placebo (3). Cette différence reflète probablement les effets indésirables des antiarythmiques. Les bêta-bloqueurs (antiarythmiques de classe II) doivent être utilisés s'ils sont indiqués dans le cadre du traitement de la cardiopathie structurelle sous-jacente. Ils sont bénéfiques dans l'insuffisance cardiaque symptomatique ou s'ils sont nécessaires pour le soulagement des symptômes résultant d'extrasystoles ventriculaires. Les antagonistes du calcium non dihydropyridiniques (vérapamil, diltiazem) ne doivent pas être utilisés chez les patients qui ont une fonction systolique ventriculaire gauche significativement réduite. Si les extrasystoles ventriculaires augmentent pendant l'exercice chez un patient qui a une coronaropathie, un bilan en vue d'une angioplastie coronaire transluminale percutanée ou d'un pontage aorto-coronarien doit être envisagé (1).
Références pour le traitement
1. Pedersen CT, Kay GN, Kalman J, et al: EHRA/HRS/APHRS expert consensus on ventricular arrhythmias. Heart Rhythm 11(10):e166–e196, 2014. doi: 10.1016/j.hrthm.2014.07.024
2. Latchamsetty R, Bogun F: Premature Ventricular Complex-Induced Cardiomyopathy. JACC Clin Electrophysiol 5(5):537–550, 2019. doi: 10.1016/j.jacep.2019.03.013
3. Echt DS, Liebson PR, Mitchell LB, et al: Mortality and morbidity in patients receiving encainide, flecainide, or placebo. The Cardiac Arrhythmia Suppression Trial. N Engl J Med 324(12):781–788, 1991. doi: 10.1056/NEJM199103213241201
Pronostic des extrasystoles ventriculaires
Les extrasystoles ventriculaires sont bénignes en l'absence de cardiopathie associée. Aucun traitement n'est nécessaire au-delà de l'élimination des facteurs déclenchants évidents. La thérapie n'est proposée que si les symptômes sont intolérables ou si les extrasystoles ventriculaires sont très fréquentes ce qui peut induire une asynchronie interventriculaire et une cardiomyopathie avec arrêt cardiaque. Les autres antiarythmiques qui suppriment les extrasystoles ventriculaires augmentent le risque de troubles du rythme plus graves.