Maladie rénale chronique

(Insuffisance rénale chronique ; IRC)

ParAnna Malkina, MD, University of California, San Francisco
Vérifié/Révisé oct. 2023 | Modifié nov. 2023
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Les faits en bref

La maladie rénale chronique est une détérioration lente et progressive (qui s’étend sur des mois ou des années) de la capacité des reins à filtrer les déchets métaboliques du sang.

  • Les causes majeures sont le diabète et l’hypertension artérielle.

  • Le sang s’acidifie, une anémie se développe, les nerfs sont endommagés, les tissus osseux se détériorent et le risque d’athérosclérose augmente.

  • Les symptômes peuvent comprendre mictions nocturnes, fatigue, nausées, démangeaisons, soubresauts et crampes musculaires, perte d’appétit, confusion, détresse respiratoire et œdème du corps (le plus fréquemment au niveau des jambes).

  • Des analyses de sang et d’urine sont nécessaires pour établir le diagnostic.

  • Le traitement vise à limiter les liquides, le sodium et le potassium dans l’alimentation ; la prise de médicaments destinés au traitement d’autres pathologies (telles que le diabète, l’hypertension artérielle, l’anémie et les déséquilibres électrolytiques) ; et, le cas échéant, à faire appel à la dialyse ou à une greffe de rein.

(Voir aussi Présentation de l’insuffisance rénale.)

De nombreuses maladies peuvent porter atteinte au rein de façon irréversible. Une lésion rénale aiguë peut devenir une maladie rénale chronique si la fonction rénale n’est pas rétablie après le traitement et dure plus de trois mois. Ainsi, toute situation pouvant provoquer une lésion rénale aiguë peut provoquer une maladie rénale chronique. Cependant dans les pays occidentaux, les causes les plus fréquentes de maladie rénale chronique sont les suivantes

Les deux pathologies endommagent directement les petits vaisseaux rénaux.

D’autres causes de maladie rénale chronique comprennent le blocage des voies urinaires (obstruction des voies urinaires), certaines malformations rénales (telles que la maladie rénale polykystique et la glomérulonéphrite) et des maladies auto-immunes (telles que le lupus érythémateux disséminé [lupus]), au cours desquelles des anticorps lèsent les petits vaisseaux sanguins (glomérules) et les petits tubes (tubules) des reins.

La maladie rénale chronique provoque de nombreux problèmes dans l’ensemble du corps :

  • Lorsque la perte de la fonction rénale est légère ou modérément grave, les reins ne peuvent pas absorber l’eau provenant de l’urine pour réduire le volume d’urine et concentrer celle-ci.

  • Par la suite, les reins perdent leur capacité à excréter les acides normalement produits par l’organisme et le sang s’acidifie, une maladie dénommée acidose.

  • La capacité d’excrétion du potassium diminue, entraînant des taux élevés dans le sang, une affection appelée hyperkaliémie.

  • La production de globules rouges baisse, entraînant une anémie.

  • Des niveaux élevés de déchets métaboliques dans le sang peuvent endommager les cellules nerveuses du cerveau, du tronc, des bras et des jambes. Les taux d’acide urique peuvent augmenter, provoquant parfois des épisodes de goutte.

  • Les reins malades produisent des hormones qui élèvent la tension artérielle. En outre, les reins malades ne parviennent pas à éliminer l’excès de sodium et d’eau. La rétention de sel et d’eau peut contribuer à l’hypertension artérielle et à l’insuffisance cardiaque.

  • L’enveloppe qui entoure le cœur (le péricarde) peut être atteinte par une inflammation (péricardite).

  • Le taux de triglycérides dans le sang est souvent élevé, ce qui, associé à l’hypertension artérielle, accroît le risque d’athérosclérose.

  • La formation et l’entretien du tissu osseux peuvent être perturbés (ostéodystrophie rénale) si certaines pathologies associées à la maladie rénale chronique persistent longtemps. Ces pathologies comprennent des taux élevés de parathormone, une faible concentration sanguine de calcitriol (la forme active de la vitamine D), la diminution de l’absorption du calcium et une concentration élevée de phosphate dans le sang. L’ostéodystrophie rénale peut provoquer des douleurs osseuses et un risque accru de fractures.

Symptômes de la maladie rénale chronique

Les symptômes se développent généralement très lentement. À mesure que l’insuffisance rénale progresse et que les déchets métaboliques s’accumulent dans le sang, les symptômes évoluent.

Une perte de la fonction rénale légère à modérée peut ne causer que de légers symptômes, tels qu’une nécessité d’uriner plusieurs fois la nuit (nycturie). La nycturie survient parce que les reins ne peuvent pas absorber l’eau provenant de l’urine pour réduire le volume de celle-ci et la concentrer, comme cela se produit normalement pendant la nuit.

À mesure que la fonction rénale s’aggrave et que de plus en plus de déchets métaboliques s’accumulent dans le sang, la personne peut ressentir une asthénie, une faiblesse généralisée et des difficultés de concentration intellectuelle. Elles peuvent présenter une perte d’appétit et un essoufflement. L’anémie contribue également à l’asthénie et à la faiblesse généralisée.

L’accumulation de résidus métaboliques dans le sang provoque également une perte d’appétit, des nausées, des vomissements et un goût désagréable dans la bouche, qui entraînent malnutrition et perte de poids. Les personnes souffrant de maladie rénale chronique ont tendance à développer facilement des hématomes ou à saigner pendant un temps inhabituellement long à la suite de coupures ou d’autres lésions. L’insuffisance rénale chronique diminue également la capacité de l’organisme à combattre les infections. La goutte peut provoquer une arthrite aiguë avec des douleurs et un gonflement des articulations.

Une perte de la fonction rénale sévère entraîne une accumulation des déchets métaboliques à des taux plus élevés dans le sang. Les lésions musculaires et nerveuses peuvent entraîner des soubresauts musculaires, une faiblesse musculaire, des crampes et des douleurs. Les personnes peuvent ressentir une sensation de fourmillements au niveau des bras et des jambes et peuvent également subir une perte de sensibilité dans différentes régions du corps. Elles peuvent développer un syndrome des jambes sans repos. Une encéphalopathie, une pathologie qui entraîne un dysfonctionnement du cerveau, peut s’ensuivre et comporter confusion, léthargie et convulsions.

L’insuffisance cardiaque peut provoquer un essoufflement. Un œdème du corps peut apparaître, en particulier au niveau des jambes. La péricardite peut provoquer douleur thoracique et hypotension. Les personnes qui souffrent de maladie rénale chronique à un stade avancé présentent souvent des ulcères digestifs et des saignements. La peau peut prendre une couleur jaune brun et/ou un aspect sec, et la concentration d’urée est parfois si élevée qu’elle cristallise dans la sueur et forme une poudre blanche à la surface de la peau. Certaines personnes qui souffrent d’insuffisance rénale chronique se plaignent de démangeaisons sur tout le corps. Leur haleine peut être malodorante.

Diagnostic de la maladie rénale chronique

  • Analyses de sang et d’urine

  • Échographie

  • Parfois, biopsie

Des analyses de sang et d’urine sont indispensables. Elles confirment la détérioration de la fonction rénale.

Lorsque la perte de la fonction rénale atteint un certain niveau dans la maladie rénale chronique, les taux de substances biochimiques dans le sang deviennent en général anormaux.

  • Les taux d’urée et de créatinine, des déchets métaboliques normalement excrétés par les reins, sont augmentés.

  • Le sang s’acidifie modérément.

  • Le potassium dans le sang est souvent normal ou seulement légèrement augmenté, mais il peut devenir dangereusement élevé.

  • Le calcium et le calcitriol dans le sang diminuent.

  • Les taux de phosphate et de parathormone augmentent.

  • Le taux d’hémoglobine est généralement inférieur (ce qui signifie que la personne présente un certain degré d’anémie).

Les médecins mesurent la fonction rénale à l’aide du taux de créatinine dans le sang, du sexe et du poids corporel dans une formule appelée débit de filtration glomérulaire estimé (DFGe). Certaines de ces formules utilisaient l’origine ethnique pour évaluer si la fonction rénale était anormale. Cependant, cela augmentait les disparités en matière de soins de santé entre les origines ethniques concernant le diagnostic et le traitement de la maladie rénale. Pour cette raison, il n’est plus recommandé d’inclure l’origine ethnique dans ces évaluations.

La mesure du taux sérique de potassium est importante, car il peut s’élever dangereusement si l’insuffisance rénale atteint un stade avancé ou si la personne ingère des quantités importantes de potassium ou si elle prend un médicament qui empêche l’excrétion de potassium par les reins.

L’analyse d’urine permet de détecter de nombreuses anomalies, y compris la présence de protéines et de cellules pathologiques.

Une échographie est souvent pratiquée pour écarter la possibilité d’obstruction et pour vérifier le volume des reins. Des reins de dimensions réduites et présentant des cicatrices sont souvent le signe que la perte de la fonction rénale est chronique. Il devient difficile de déterminer la cause précise de la maladie rénale chronique si celle-ci atteint un stade avancé.

Le prélèvement d’un échantillon de tissu d’un rein pour examen (biopsie rénale) peut être l’examen le plus précis, mais il n’est pas préconisé si les données de l’échographie révèlent des reins de dimensions déjà réduites ou présentant des cicatrices.

Traitement de la maladie rénale chronique

  • Traitement des affections qui aggravent l’état de la fonction rénale

  • Mesures diététiques et médicaments

  • Dialyse ou greffe de rein

L’objectif du traitement est de ralentir le déclin de la fonction rénale et de retarder la dialyse.

Les pathologies pouvant provoquer ou aggraver la maladie rénale chronique et pouvant nuire à l’état de santé général doivent être traitées rapidement. Ces pathologies incluent

Le contrôle du taux de sucre dans le sang (glycémie) et de l’hypertension artérielle ralentit de manière importante la détérioration de la fonction rénale chez les diabétiques. Des médicaments appelés inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) et antagonistes du récepteur de l’angiotensine II (ARA), qui aident à diminuer la pression artérielle, peuvent diminuer la vitesse de détérioration de la fonction rénale chez certaines personnes souffrant de maladie rénale chronique. Les médicaments appelés inhibiteurs du cotransporteur sodium-glucose de type 2 (SGLT2) peuvent également ralentir la détérioration de la fonction rénale, mais ils doivent être évités chez les personnes atteintes de diabète de type 1.

Les médecins évitent de prescrire des médicaments qui sont excrétés par les reins ou prescrivent ces médicaments à plus faibles doses. Il peut être nécessaire de devoir éviter de nombreux autres médicaments. Par exemple, il peut être nécessaire de devoir arrêter les inhibiteurs de l’ECA, les ARA et certains diurétiques (comme la spironolactone, l’amiloride et le triamtérène) chez les personnes souffrant d’une maladie rénale chronique grave et présentant des taux élevés de potassium, parce que ces médicaments peuvent augmenter les taux de potassium.

Les obstructions des voies urinaires sont retirées ou soulagées. Les infections bactériennes sont traitées par antibiotiques.

Des mesures diététiques doivent être prises.

Restriction de la consommation de protéines

La détérioration de la fonction rénale peut être légèrement ralentie si la consommation quotidienne de protéines est limitée. Les personnes doivent consommer des glucides en quantité suffisante pour compenser la réduction de l’apport en protéines. Si la consommation de protéines est restreinte, un suivi par un diététicien est conseillé pour s’assurer qu’une quantité adéquate d’acides aminés est consommée.

Contrôle de l’acidose

Parfois, une légère acidose peut être contrôlée en augmentant la consommation de fruits et légumes et en réduisant la consommation de protéines d’origine animale. Cependant, une acidose modérée ou sévère peut justifier un traitement avec des médicaments antiacides (par exemple, bicarbonate de sodium et citrate de sodium).

Diminution des taux de triglycérides

Les taux de triglycérides et de cholestérol dans le sang peuvent être relativement contrôlés en limitant la consommation des graisses dans l’alimentation. Les médicaments tels que les statines, l’ézétimibe ou les deux peuvent s’avérer nécessaires pour réduire les taux de triglycérides et de cholestérol.

Restriction de l’apport en sodium et en potassium

Une limitation de la consommation de sel (sodium) est généralement bénéfique, en particulier en cas d’insuffisance cardiaque.

Il peut être nécessaire de limiter l’absorption de liquide afin de prévenir une baisse trop importante du taux de sodium dans le sang. Les aliments très riches en potassium, tels que les substituts du sel, doivent être évités et les aliments relativement riches en potassium, tels que les dattes, les figues, ainsi que de nombreux autres fruits, ne doivent pas être consommés en excès. (Voir la publication Potassium and Your CKD Diet [Le potassium et votre régime dans la maladie rénale chronique] de la National Kidney Foundation pour de plus amples informations.)

Un taux de potassium élevé dans le sang augmente les risques d’anomalies du rythme cardiaque et d’arrêt cardiaque. Lorsque le taux de potassium devient trop élevé, les médicaments diminuant le taux de potassium (comme le polystyrène sulfonate de sodium, le patiromer et le cyclosilicate de zirconium) peuvent être utiles, mais une dialyse en urgence peut s’avérer nécessaire.

Contrôle des taux de phosphore

Un taux de phosphore élevé dans le sang peut provoquer la formation de dépôts de calcium et de phosphore dans les tissus, y compris dans les vaisseaux sanguins. En limitant la consommation d’aliments à teneur élevée en phosphore, tels que les produits laitiers, le foie, les légumes, les noix et la plupart des boissons gazeuses, on abaisse la concentration de phosphate dans le sang. De plus, des médicaments oraux qui fixent le phosphate, tels que le carbonate de calcium, l’acétate de calcium, le sévélamer, le lanthane et le citrate ferrique, peuvent aussi diminuer le taux de phosphore dans le sang. Le citrate de calcium doit être évité. Le citrate de calcium fait partie de la composition de beaucoup de suppléments en calcium et se retrouve dans de nombreux produits en tant qu’additif alimentaire (parfois dénommé E333). La vitamine D et des médicaments similaires sont souvent pris par voie orale pour réduire les taux élevés de parathormone.

Traitement des complications

L’anémie causée par la maladie rénale chronique est traitée par

  • Des médicaments tels que l’érythropoïétine ou la darbépoïétine

  • Des transfusions sanguines

Les médecins recherchent et traitent également d’autres causes de l’anémie, en particulier des carences alimentaires en fer, en folates (acide folique) et en vitamine B12 (voir Anémie par carence vitaminique) et un éventuel saignement gastro-intestinal (perte de sang par le tube digestif).

La plupart des personnes traitées par érythropoïétine ou darbépoïétine doivent régulièrement recevoir du fer par voie intraveineuse afin de prévenir une carence en fer, qui diminuerait la réponse de l’organisme à ces médicaments. L’érythropoïétine et la darbépoïétine ne doivent être employées que lorsque cela s’avère nécessaire parce qu’elles peuvent accroître le risque d’accident vasculaire cérébral. La tendance aux saignements peut être temporairement supprimée par des transfusions de produits sanguins ou par des médicaments tels que la desmopressine ou les œstrogènes. Ces traitements peuvent être nécessaires après un traumatisme, avant une intervention chirurgicale ou avant une extraction dentaire.

Des transfusions sanguines ne sont administrées que lorsque l’anémie est grave, qu’elle entraîne des symptômes et qu’elle ne répond pas à l’érythropoïétine ou à la darbépoïétine.

L’hypertension est traitée par des antihypertenseurs pour prévenir une aggravation de la détérioration des fonctions rénale et cardiaque.

Les diurétiques peuvent également améliorer les symptômes de l’insuffisance cardiaque, même lorsque la fonction rénale est très amoindrie, mais la dialyse peut être nécessaire pour éliminer l’eau corporelle en excès dans les cas graves de maladie rénale chronique.

Traitement de la maladie rénale chronique avancée

Lorsque les traitements de la maladie rénale chronique ne sont plus efficaces, les seules options sont la dialyse à long terme et la greffe rénale. Les deux options diminuent les symptômes et prolonger la vie. Si la personne y est candidate, une greffe de rein peut être une excellente option. Pour les personnes qui choisissent de ne pas subir de dialyse, les soins de fin de vie (également appelés soins palliatifs) sont importants.

Pronostic de la maladie rénale chronique

Si la maladie rénale chronique est provoquée par un trouble qui peut être corrigé (par exemple, une obstruction des voies urinaires) et si ce trouble n’est pas présent depuis trop longtemps, la fonction rénale peut s’améliorer lorsque le trouble responsable de la maladie est efficacement traité. Sinon, l’état de la fonction rénale a tendance à s’aggraver avec le temps. La vitesse de la détérioration de la fonction rénale dépend en partie du trouble sous-jacent qui provoque la maladie rénale chronique et de la manière dont le trouble est contrôlé. Par exemple, le diabète et l’hypertension artérielle, en particulier quand ils sont mal contrôlés, sont la cause d’une détérioration plus rapide de la fonction rénale. La maladie rénale chronique est fatale si elle n’est pas traitée.

Lorsque la détérioration de la fonction rénale est grave (parfois appelée insuffisance rénale terminale ou maladie rénale terminale), la survie est en général limitée à quelques mois chez les personnes non traitées, alors que les personnes traitées par dialyse peuvent vivre bien plus longtemps. Toutefois, même sous dialyse, les personnes présentant une insuffisance rénale terminale décèdent plus tôt que les personnes de leur âge qui ne présentent pas de maladie rénale terminale. La plupart d’entre elles décèdent de troubles ou d’infections affectant le cœur ou les vaisseaux sanguins.

Informations supplémentaires

Les ressources suivantes, en anglais, peuvent être utiles. Veuillez noter que LE MANUEL n’est pas responsable du contenu de ces ressources.

  1. National Institute of Diabetes and Digestive and Kidney Diseases (NIDDK ; Institut national américain du diabète et des maladies digestives et rénales) : NIDDK fournit des informations générales sur les maladies rénales, notamment les découvertes de recherche, les statistiques, et les programmes de santé et de sensibilisation communautaires.  

  2. National Kidney Foundation (NKF ; Fondation nationale américaine du rein) : La NKF fournit des informations relatives à la maladie rénale et à la transplantation rénale, une aide financière basée sur les besoins pour aider à gérer les frais médicaux, des webinaires à destination des professionnels de la santé, ainsi que des opportunités de plaidoyer pour intérêts des patients.

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